Toutes ces étiologies sont
rapidement réfutées. Ainsi, par exemple, le diagnostic d’ulcère phagédénique,
cause très fréquente des ulcères chroniques en zone tropicale, est
éliminé : sa localisation siège presque toujours au niveau des membres
inférieurs, il est très douloureux, ses bords ne sont pas décollés et il
survient sur un terrain débilité.
Le diagnostic d’Ulcère de
Buruli est apporté :
- par l’examen direct de
frottis colorés selon la méthode de Ziehl-Neelsen
- par culture sur milieu
spécifique (milieu de Leowenstein-Jensen, et BATEC®)
- et par PCR, technique
utilisant l’amplification d’une séquence d’ADN spécifique de M. ulcerans.
Le diagnostic est apporté
ici par l’étude des frottis en zone périphérique de l’ulcération qui met en
évidence à la coloration de Ziehl-Neelsen quelques bacilles
acido-alcoolo-résistants (BAAR).
Il s’agit donc d’un ulcère
de Buruli, dans un foyer endémique connu.
La Côte d’Ivoire est, en
effet, le pays d’Afrique de l’ouest où a été rapporté le plus grand nombre
d’Ulcères de Buruli depuis 1989. Environ 500 nouveaux cas sont dépistés chaque
année.
L’Ulcère de Buruli est
devenu un problème majeur de santé publique dans les PED. L’OMS a, en 1997,
classé cette infection parmi les maladies émergentes prioritaires.
Maladie liée à l’écosystème
aquatique, la transmission humaine de l’Ulcère de Buruli est probablement
directe transcutanée à partir du réservoir hydrotellurique, mais certains
insectes (punaises d’eau) pourraient jouer un rôle dans la transmission.
L’Ulcère de Buruli atteint
surtout les femmes et les enfants vivant en zones rurales, prés des rivières et
des marais.
Il est plus fréquent au
niveau des membres.
Il est caractérisé par deux
stades :
- un stade pré-ulcératif à
type de papule, de nodule,
- un stade ulcératif
réalisant une perte de substance dermo-épidermique plus ou moins large, à fond
nécrotique, à bords décollés. La nécrose des tissus accompagnant l’ulcération,
est due à une toxine produite par la bactérie, la mycolactone.
C’est au stade ulcératif
que sont vus la majorité des malades qui consultent avec retard.
L’évolution peut se faire
vers une cicatrisation au prix d’ankylose, d’atrophies vicieuses et d’impotence
fonctionnelle. Les atteintes ostéo-articulaires et des os longs sont fréquentes
au cours de l’évolution. Il faut toujours craindre le tétanos. Il n’y aurait
pas de cancérisation.
Le traitement de l’Ulcère
de Buruli est médico-chiturgical. Alors que le traitement chirurgical était
seul, il y a encore quelques années, à donner des résultats, l’efficacité du
traitement médical a été prouvée lors de la première Conférence Mondiale à
Yamoussoukro en 1999. Il repose actuellement sur l’association
rifampicine-streptomycine pendant 4 semaines, suivi si nécessaire d’une
excision-greffe qui consiste à retirer les zones lésées, puis d’une greffe de
peau.
Dans le cas présenté, le
traitement a consisté en une antibiothérapie associant rifampicine 600 mg/j
et streptomycine 1 g/j pendant 4
semaines, Le malade a été revu à l’issue : l’ulcération évoluant vers la
cicatrisation, la greffe n’a pas été retenue.
La prévention consisterait
à éviter les bains dans les mares boueuses. Le BCG à la naissance assure une protection significative contre le
développement d’une ostéomyélite à M.
ulcerans.
Références
Josse R., Guedenon A.,
Darie H., Anagonou S ., Portaels F., Meyers W.M. Les infections cutanées à
Mycobactérium ulcerans : ulcères
de Buruli. Med. Trop., 1995, 55, 363-373.
Touze J.E, Peyron F., Malvy
D. Un ulcère peu bénin. Médecine Tropicale au quotidien. 100 cas cliniques.
Format Utile. Editions Varia, mars 2001, pp. 221-224.
Kanga J.M., Kacou E.D.,
Kouame K. et coll. L’Ulcère de Buruli : aspects épidémiologiques,
cliniques et thérapeutiques en Côte d’Ivoire. Med. Trop., 2004, 64,
238-242.
Ekaza E., Kacou-N’Douba A.,
Oniangué N .C. et coll. Apport de l’amplification génique dans la
détection de Mycobactérium ulcérans
dans les exsudats et les biopsies cutanées en Côte d’Ivoire. Bull. Soc. Path. Exot., 2004,
97, 95-96.
Iconographie
Ulcération à bords
décollés, avec zone hyperchromique périphérique
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Collections: Pr. Pierre Bobin. Bordeaux 2
Professeur Pierre Aubry.
Texte rédigé le 25/03/05.
Remerciements de l’auteur
au Docteur Pierre Bobin.