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Lettre d’information

La lettre d’information du diplôme et de la capacité de médecine tropicale des pays de l’océan indien.

N° 11. Avril 2008

 

 

La lettre d’information n° 11 traite de la prise en charge et de la prévention du paludisme d'importation. Il est rédigé suite à la révision 2007 de la Conférence de Consensus 1999, révision organisée par la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française.

 

Environ 5 000 cas de paludisme d'importation à Plasmodium falciparum sont observés en France chaque année, et sont responsables d'environ une vingtaine de décès. Or, le cours sur le paludisme du site http://www.medecinetropicale.com traite du paludisme en général, sans référence particulière au paludisme d'importation. Il est donc nécessaire de reprendre l'étude de la prise en charge des formes graves et des formes non compliquées du paludisme d'importation à P. falcipârum et des méthodes de prévention.

Toute suspicion de paludisme après un séjour en zone d'endémie doit faire l'objet d'un diagnostic parasitologique en urgence, basé sur l'examen microscopique (frottis sanguin et goutte épaisse) associé ou non à une détection antigénique rapide (test de diagnostic rapide).

Les critères de gravité de l'OMS (2000) sont les mêmes pour l'adulte et pour l'enfant. Tout paludisme qui présente au moins un des critères de gravité doit être admis dans un service de réanimation.

 

La prise en charge de l’accès palustre grave chez l'adulte

La quinine injectable reste l'antipaludique schizonticide de référence. Le QUINIMAX ® est prescrit en perfusion intraveineuse en ampoules de 1, 2, 4 ml, correspondant à 125, 250, 500 mg. Il contient 125 mg d'alcaloïdes-base pour 1 ml. La dose de charge est de 16 mg/kg perfusée en 4 heures dans du sérum glucosé à 5%. La dose d'entretien est de 24 mg/24 heures débutée 4 heures après la fin de la dose de charge. Elle est administrée de façon discontinue à la dose de 8 mg/kg sur 4 heures minimum toutes les 8 heures, soit de façon continue à la dose de 24 mg/kg sur 24 heures au pousse-seingue électrique. La durée totale du traitement est de 7 jours, le relais per os pouvant être pris à partir de la 72ème heure.

La dose de charge est contre-indiquée si la malade a été traité avant l'hospitalisation par la quinine à dose curative (dans les 2 jours précédents) ou par la méfloquine ou l'halofantrine (la dernière prise datant de moins de 12 heures) ou si l'allongement de l'espace QT est supérieur à 25%.
Chez la femme enceinte, la quinine est utilisée aux mêmes doses, mais il existe un risque d'hypoglycémie.

Un contrôle quotidien de la quininémie plasmatique est recommandé pendant au minimum les 72 premières heures du traitement. Une quininémie plasmatique efficace est comprise entre 10 et 12 mg/l. Ce contrôle est indispensable en cas d'insuffisance rénale ou hépatique. Un électrocardiogramme doit être pratiqué avant le début du traitement et chaque jour pendant toute sa durée. La surveillance cardiovasculaire est indispensable chez les sujets âgés et/ou atteints d'une cardiopathie, en cas de prise concomitante de médicaments allongeant l'espace QT, de diurétiques, d'antihypertenseurs.

La surveillance de la parasitémie est souhaitable jusqu'à sa négativation. La parasitémie augmente durant les premières 24 heures, sans que ceci ait une valeur péjorative.

La prescription de doxycycline (ou de clindamycine chez la femme enceinte) est limitée aux cas de paludisme contracté dans les jungles d'Amazonie ou d'Asie su sud-est.

 

La prise en charge du paludisme grave chez l'enfant.

La quinine intraveineuse reste le traitement de référence du paludisme grave de l'enfant. La dose de charge n'est pas recommandée chez l'enfant en cas de paludisme d'importation. La posologie standard est de 24 mg/kg/j de quinine base, soit une perfusion de 8 mg/kg toutes les 8 heures. La quinine s'administre en perfusion dans du sérum glucosé à 5% en perfusions de 4 heures minimum, ou à la seringue électrique, sous surveillance ECG continue. Un contrôle de la quininémie est effectué à la 72ème heure. La glycémie doit être régulièrement surveillée. Le relais par voie orale est effectué dés que l'état de l enfant le permet.

 

La prise en charge des défaillances viscérales chez l'adulte et chez l'enfant.

La prise en charge des défaillances viscérales au cours du paludisme d'importation de l'adulte et de l'enfant est réalisée dans les services de réanimation : traitement symptomatique du coma, de l'hypoglycémie, de la déshydratation, du collapsus, de l'acidose métabolique, de l'œdème pulmonaire, des hémorragies par CIVD, de la thrombopénie, etc., prise en charge toujours difficile à, réaliser en zone tropicale.

 

 

La prise en charge des formes non compliquées du paludisme à P. falciparum chez l'adulte

Les produits recommandés chez l'adulte sont en première ligne, l'atovaquone-proguanil (MALARONE®) ou l'artéméther-luméfantrine (RIAMET/COARTEM®); en deuxième ligne, la quinine ou la méfloquine (LARIAM®). L'halofantrine n'est plus prescrite chez l'adulte.

Chez la femme enceinte, seule la quinine a fait la preuve d'une parfaite innocuité.

 

Le traitement des formes non compliquées du paludisme à P. falciparum chez l'enfant;

Les médicaments de première ligne sont la méfloquine ou l'atovaquone-proguanil ou l'artéméther-luméfantrine. L'halofantrine et la quinine sont des traitements de seconde ligne.

 

Note : les dérivés de l'artémisinine (artéméther et artésunate) ne sont pas en pratique utilisés dans le traitement du paludisme d'importation; l'artésunate n'étant pas disponible et l'artéméther n'étant obtenu que dans le cadre d'une ATU nominatve.

 

La prévention contre la paludisme d'importation.

Elle comporte les répulsifs associés aux moustiquaires imprégnées et la chimioprophylaxie. La protection antimoustique est souvent négligée et la chimioprophylaxie absente, inadéquate et arrêtée prématurément, en particulier dès le retour en France.

Les produits et les posologies recommandés sont rappelés dans le tableau ci-dessous.

 

 

Groupe de

chimiorésistance

 

 

Adulte

 

Femme enceinte

 

Enfant

 

Groupe 1

 

 

NIVAQUINE® (chloroquine)

100 mg/j

Séjour+4 semaines au retour

 

 

NIVAQUINE® 100 mg/j

Séjour+4 semaines au retour

 

NIVAQUINEivaquine® 1,5mg/kg/j

Séjour+4 semaines au retour

 

Groupe 2

 

 

NIVAQUINE® + PALUDRINE®

(chloroquine 100 mg/j + proguanil 200mg/j) ou SAVARINE®

Séjour+4 semaines au retour

ou

MALARONE® (atovaquone 250 mg+ proguanil 100mg) : 1cp/j

Séjour+1 semaine au retour

 

SAVARINE®

Séjour+4 semaines au retour

 

NIVAQUINE® 1,5 mg/kg/j

+ PALUDRINE® 3 mg/kg/j

Séjour+4 semaines au retour

ou

MALARONE® 62,5 mg /25mg  Enfants

si > 11 kg et < 40kg :

 1cp/10kg/j

Séjour+1 semaine au retour

 

Groupe 3

 

 

MALARONE®

ou

LARIAM® (méfloquine)

 1 cp/semaine

Séjour + 3 semaines au retour ou

DOXY-PALU® (doxycycline)

100 mg/j

Séjour+4 semaines au retour

 

 

MALARONE®

ou

LARIAM®

 

MALARONE® Enfants

ou

LARIAM® si poids> 15 kg

5 mg/kg/sem

Séjour + 3 semaines au retour ou

DPXY-PALUu® sI > 8 ans

50 mg/j si < 40 kg

Séjour+4 semaines au retour

 

Chez la femme enceinte, la chloroquine et le proguanil peuvent être prescrits sans réserve. L'utilisation de l'atovaquone-proguanil et de la méfloquine peut être envisagé au cours de la grossesse. La doxycycline est contre-indiquée.

 

Chez l'enfant, la méfloquine n'est prescrite qu'à partir de 15 kg de poids. L'atovaquone-proguani n'est prescrite qu'à partir de 11 kg de poids (MALARONE® enfants cp. à 62,5 mg/25 mg); cependant, sa prescription hors AMM est admise à partir de 5 kg (de 5 à 7 kg : ½ cp/j, de 7 à 11 kg : ¾ cp/j). La doxycycline est contre-indiquée chez le enfant de moins de 8 ans. Avant l'âge de 6 ans, les comprimés doivent être écrasés. Chez l'enfant de moins de 5 kg, la chimioprophyalxie dans les pays du groupe 2 et du groupe 3 se limite à l'association chloroquine + proguanil.

 

La lettre d’information du diplôme et de la capacité de médecine tropicale des pays de l’océan indien. N°11 – avril 2008. Pr. Pierre Aubry, 11 rue Pierre Loti, 64 500 Saint-Jean-de-Luz. aubry.pierre@wandoo.fr 

 

Professeur Pierre Aubry, texte rédigé le 31 mars 2008