Anguillulose maligne mortelle et syndrome d’Ogilvie chez un
insuffisant respiratoire chronique traité par corticoïdes à l’île de la Réunion
(Océan indien)
Gaüzère B-A, Schlossmacher P, Jaffar-Bandjee, O, Aubry P
Observation. Mr X 69 ans, insuffisant respiratoire chronique
dénutri, traité par corticothérapie est hospitalisé en juin 2002 pour détresse
respiratoire. Abdomen sensible avec météorisme abdominal. Biologie :
absence d’éosinophiles, anémie discrète, sérologies négatives (VIH, HTLV).
Survenue de complications respiratoires (pneumopathie nosocomiale à P.
aeruginosa), et digestives : syndrome d’O’Gilvie (dilatation du cadre
colique avec au TDM pneumatose pariétale témoignant d’une souffrance localisée
et lame d’épanchement dans la gouttière pariéto-colique). La laparotomie
retrouve une sérosité claire intra-péritonéale et un colon droit très
dilaté, une caecostomie de décharge est pratiquée. Présence de larves
d’anguillules dans le liquide péritonéal prélevé avant la caecostomie, ainsi que dans les selles, (non recherchées les liquides de lavage
broncho-alvéolaire ou l’aspiration digestive). Traitement par albendazole,
décès dans un tableau de défaillance multiviscérale, à J6. Pas d’autopsie.
Discussion. Le syndrome d’Ogilvie
survient chez des patients post-opérés d’une chirurgie lourde ou lors d’une
affection médicale grave ; infarctus du myocarde, sepsis ou insuffisance
respiratoire. Styrongyloides stercoralis est le seul nématode dont le
cycle humain est complet. Sa répartition est mondiale, préférentiellement dans
les zones tropicales et subtropicales, mais également en Europe. Le diagnostic
repose sur la biologie (hyperéosinophilie), la sérologie et l’isolement des
larves dans les selle après enrichissement (méthode de Baermann).
L’hyperéosinophilie si évocatrice des parasitoses fait défaut en cas
d’immunodépression où il y a auto-infection : les larves rhabditoïdes se
transforment dans l’intestin grêle en larves strongyloïdes infestantes qui
franchissent la muqueuse intestinale avant de gagner tous les organes (cerveau,
poumon…) par voie sanguine. Toutes les thérapeutiques et toutes les pathologies
responsables d’une diminution de l'immunité à médiation cellulaire peuvent
aboutir chez un sujet parasité à une anguillulose hyperinfestante ou disséminée
maligne. La corticothérapie au long cours est la plus fréquemment incriminée.
Conclusion : 1ère
observation de syndrome d’Ogilvie associée à une anguillulose maligne chez un
patient immunodéprimé. La Réunion étant une région d’endémie pour l’anguillulose,
il semble important d’effectuer, avant tout traitement immunosuppresseur, une
recherche d’anguillules par coproculture et de proposer une prophylaxie par
l’albendazole.
Bibliographie
Nozais JP. et coll. Anguillulose disséminée. Rev. Prat., 2001, 30,
8&3-8
Brunetti G., Aubry P., Dano P, Renambot J, Ménard M.
A propos d’une anguillulose aggravée par la corticothérapie. Dakar médical,
1982, 27, 4, 471-478..