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Réémergence du virus chikungunya à la Réunion, Août 2009

Réémergence du virus chikungunya à la Réunion, Août 2009.

E D’Ortenzio1, E Balleydier1, M Grandadam2, JS Dehecq3, MC Jaffar-Bandjee4, A Michault5, P Renault 1, L Filleul1

 

1Cire Réunion-Mayotte, Institut de Veille Sanitaire, Saint-Denis, Réunion, France.

2Centre National de Référence des Arbovirus, Institut Pasteur, Paris, France.

3Service de Lutte Anti-Vectorielle, Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales, Saint-Denis, Réunion, France.

4Laboratoire de microbiologie, Centre Hospitalier Régional, site Hôpital Félix Guyon, Saint-Denis, Réunion, France.

5Laboratoire de bactériologie, parasitologie, virologie et hygiène hospitalière, Centre Hospitalier Régional, site Groupe Hospitalier Sud Réunion, Saint-Pierre, Réunion, France.

 

En 2005 -2006, la Réunion a connu une épidémie majeure de chikungunya, qui selon une  étude de séroprévalence, aurait touchée 38% de la population. Depuis décembre 2006, aucun nouveau cas autochtone d’infection au virus chikungunya n’a été confirmé installant l’île dans une situation inter-épidémique pour cet arbovirus. Début août 2009, une infection récente par le virus du chikungunya chez une personne résidant à Saint Gilles-les-Bains a été signalée à la Cellule de l’Institut de Veille Sanitaire en région Réunion-Mayotte (Cire Réunion-Mayotte). Après investigation épidémiologique et biologique, ce cas a été confirmé par le Centre national de référence (CNR) des arbovirus, Institut Pasteur, Paris. Il s’agissait du premier cas confirmé de chikungunya autochtone à la Réunion depuis la dernière épidémie. L’objectif de ce travail était de présenter les résultats de cette investigation épidémiologique.

Les définitions de cas utilisées pour la surveillance et l’investigation ont été :

-          Cas confirmé : présence d’un des critères virologiques ou sérologiques suivants : isolement viral ou mise en évidence du génome viral par RT-PCR ou séroconversion ou augmentation récente du titre des IgG ≥ 4fois sur 2 sérums prélevés à 2 semaines d'intervalle minimum.

-          Cas probable : personne présentant un syndrome dengue-like ET des IgM chikungunya limites ou positives.

-          Cas importé : personne ayant voyagé dans une zone endémique ou épidémique de chikungunya et dont le délai entre la date d’arrivée à la Réunion et la date de début des symptômes est ≤ à 7 jours.

Au total, 4 cas confirmés et 1 cas probable de chikungunya ont été identifiés. Ces personnes étaient toutes de sexe féminin, âgées entre 25 et 65 ans, avec des signes cliniques ayant débuté entre le 18 juillet et le 3 aout 2009. Elles ont toutes en commun d’avoir séjourné (résidence principale, lieu de travail ou séjour touristique) dans un même quartier de Saint-Gilles-les-Bains. Aucun de ces cas n’a rapporté de notion de voyage en zone endémique ou épidémique connu pour le chikungunya ou de fréquentation de personnes ayant voyagé dans des zones à transmission virale documentée, ni de réception de colis en provenance d’un autre pays. La souche virale de ce foyer est actuellement analysée et comparée avec des souches ayant circulé en 2006 à la Réunion et en 2009 à Madagascar par le CNR des arbovirus. Ces investigations permettront de dire s’il s’agit d’une ré-émergence d’une souche réunionnaise de 2005-2006 ou de l’introduction d’une nouvelle souche ayant circulé plus récemment à Madagascar ou dans la région sud-ouest de l’océan Indien. L’introduction d’une souche asiatique semble exclue par la CNR des arbovirus à ce stade de l’analyse génomique.

Cet événement montre que la Réunion reste vulnérable aux maladies à transmission vectorielle et notamment aux arbovirus même pendant l’hiver austral. L’arrivée de l’été austral et de conditions de température et de pluviométrie plus favorables au développement des moustiques justifient un renforcement de la surveillance épidémiologique et entomologique. Les îles de la zone resteront soumises au risque d’émergence épidémique de nouvelles arboviroses ainsi qu’à la réémergence de la dengue ou du chikungunya tant que leur densité vectorielle restera largement supérieure au seuil nécessaire pour qu’une épidémie puisse se déclencher. Les actions préventives de lutte anti-vectorielle contre les vecteurs potentiels, en particulier Aedes albopictus, en dehors des périodes de transmission épidémique sont donc pleinement justifiées.