Envenimations par les cônes :
toujours redoutable, parfois mortelle. Le point par un médecin conchyliologue.
Pierre Aubry,
Professeur Emérite à la Faculté de Médecine d’Antananarivo (Madagascar).
Les contacts de l’homme avec les
animaux marins venimeux sont fréquents dans les eaux tropicales, l’inoculation
des venins se faisant soit au bord de l’eau, soit dans l’eau avec risque de
noyade. L’auteur, médecin conchyliologue, fait le point sur l’envenimation par
les Conidae ou cônes (mollusques,
gastéropodes, prosobranches, toxoglosses) considérés comme les plus beaux
coquillages du monde. Le premier cas d’envenimation mortelle par piqûres de
cônes a été rapporte en 1705 dans l’archipel des Moluques. Depuis, de nombreux
cas ont été décrits dans toute la province indo-pacifique, de Madagascar
jusqu’aux Tuamotu.
Les cônes sont dotés d’un appareil
venimeux avec un proboscis, fine trompe qu’ils arment d’un harpon muni de dents
radulaires, avec lesquelles ils tuent leurs proies. Les venins des cônes sont
thermostables. Ils contiennent une remarquable diversité de substances actives.
Il s’agit de petits peptides : les
conotoxines qui agissent au niveau des canaux ioniques et des récepteurs
présents dans le système neuromusculaire et dans le système nerveux central.
Les cônes ne laissent aucune
chance à leur proie. Soumise d’abord à un choc excito-toxique, comparable à un
choc électrique, celle-ci est étourdie le temps qu’agissent les conopeptides
qui bloquent toute la transmission neuromusculaire. La mort survient très vite
par paralysie des muscles respiratoires.
L’homme, après avoir ramassé un
cône et l’avoir conservé à la main, parfois l’avoir placé par commodité dans
son costume de bain (maillot, combinaison de plongée) ressent une violente
douleur au point de piqûre, suivi d’un œdème, puis dans les formes graves des
paralysies musculaires avec décès par paralysie des muscles respiratoires. Les
cônes les plus souvent en cause sont les cônes piscivores, en particulier Conus geographus, les gros cônes
malacophages, dont Conus textile,
deux cônes communs dans toute la province indo-pacifique. Il n’y a pas de sérum
antivenimeux spécifique et le traitement est symptomatique, basé en particulier
sur la réanimation respiratoire. Tout cône rencontré dans la province
indo-pacifique doit être considéré, à priori, comme dangereux, même si Conus geographus semble être le seul
capable d’entraîner la mort de l’homme.
Références
Fegan D., Andresen D. Conus
géographus envenomation. Lancet, 1997, 349, 1672.
Rual F. Les envenimations
marines : l’exemple de la Nouvelle-Calédonie. Med. Trop., 1999, 59,
287-297.
Quinot J.F. Envenimations graves
par les animaux marins. In Les envenimations graves, par G. Mion et M. Goyffon,
Arnette édit., 2000, pp. 123-130.