Introduction du virus de dengue DENV3 à Mayotte en mars 2010
T. Lernout1, N. Baroux1,
C. Giry2, P. Binder3, B. Zumbo3, E. Durquéty2,
J. Thiria3, G. Lajoinie3, G. Javaudin2, L.
Filleul1 (laurent.filleul@ars.sante.fr)
1Cellule de l’Institut de Veille Sanitaire en Région, Cire
Océan Indien, Mayotte, 2Centre Hospitalier de Mayotte (CHM), Mayotte, 3Agence de santé de l’Océan Indien,
Délégation de Mayotte, Mayotte.
Contexte. La zone du
sud-ouest de l’océan Indien est sous la menace constante d’épidémie
d’arboviroses. Une étude de séroprévalence menée en 2006 témoigne d’une
circulation ancienne de dengue à Mayotte (présence d’anticorps chez 23% de la
population, essentiellement chez les plus de 15 ans), mais aucun cas de dengue
n’a été confirmé depuis la mise en place d’une surveillance virologique en 2007.
En mars 2010, la surveillance des syndromes dengue-like à Mayotte a été
renforcée suite à l’alerte concernant des cas de dengue dans l’Océan Indien,
notamment aux Comores.
Méthode. La
surveillance de la dengue repose sur une surveillance virologique par le
laboratoire du CHM, une recherche active de personnes malades dans le voisinage
de tout cas confirmé ou probable de dengue signalé par les agents de la Lutte
anti-vectorielle (LAV) et le suivi du nombre de cas suspects vus par les
médecins du réseau de surveillance sentinelle ainsi qu’au service des urgences
du CHM sentinelles. Les critères de
confirmation d’un cas sont la mise en évidence du virus ou de son génome
(isolement viral ou RT-PCR) ou une séroconversion ou augmentation récente du
titre des IgG dengue ≥ 4 fois sur 2 sérums prélevés à 2 semaines
d’intervalle minimum. Un cas probable est un patient présentant un syndrome dengue-like récent et des IgM anti-dengue
limites ou positives.
Résultats. Fin
octobre 2010, le laboratoire du CHM a confirmé 76 cas de DENV3 et un cas de
DENV1, sur un total de 1107 analyses réalisées depuis début mars. Parmi ces cas
confirmés, 47 sont autochtones et 24 sont importés, des Comores (DENV3) et de
Guyane (DENV1). Six cas sont perdus de vue. Le dernier cas confirmé a présenté
des signes mi septembre. Le nombre de cas probables est de 31, dont 28
autochtones et 3 importés. Les cas étaient dispersés géographiquement sur
l’île, avec la survenue de petits foyers de cas autochtones à partir de fin
mai. Aucune forme grave n’a été enregistrée, ni aucun décès.
Discussion. L’introduction
du virus de la dengue DENV3 à Mayotte en mars 2010 a été suivie de
l’installation d’une circulation autochtone durable ayant entraîné l’apparition
de quelques foyers localisés, rapidement contrôlés par les actions renforcées
de la lutte anti-vectorielle. Néanmoins, le potentiel épidémique de la dengue à
Mayotte est réel puisqu’Aedes albopictus
et Ae. Aegypti sont tous les deux
présents, le premier prédominant dans les milieux urbains et semi-urbains et le
second étant retrouvé en milieu rural. L’arrivée de la saison des pluies
pourrait entraîner une intensification de la circulation virale, justifiant la
poursuite d’une surveillance renforcée.