La légionellose à la Réunion : mythe ou réalité ? État des lieux à travers une étude
prospective et rétrospective de 2002 à 2009
H. Mogalia, M.-P. Moiton
Service de médecine interne et
maladies infectieuses, Centre hospitalier Félix Guyon, CHR Saint-Denis de la
Réunion. E-mail:
marie-pierre.moiton@chr-reunion.fr
La légionellose a émergé à travers
l'intensification des interactions entre l'homme et son environnement.
Cependant, en 2008, selon les données de l'Institut national de veille
sanitaire, l'incidence était trois fois moins importante à la Réunion qu'en
France métropolitaine.
Une étude rétrospective des cas
hospitalisés du 1er janvier 2002 au 30 avril 2008 a été entreprise,
parallèlement à une étude prospective du 1er mai 2008 au 30 avril
2009 dans les quatre hôpitaux de l’île de la Réunion, afin d'évaluer
l'incidence réelle de cette pathologie sur l'île et de rechercher des
spécificités réunionnaises en termes de caractéristiques cliniques et
épidémiologiques. Les cas avérés et probables étaient définis selon la
notification en vigueur. Une analyse descriptive a été réalisée à partir des
données recueillies dans les dossiers médicaux.
Pendant la période de l’étude, 27
cas ont été recensés : 25 cas dans l’étude rétrospective et 2 cas dans
l’étude prospective, confirmant une sous notification et un sous diagnostic des
cas ainsi qu'une incidence faible de cette pathologie. On retrouve certaines
spécificités cliniques telles qu'une comorbidité plus importante, des formes
plus graves mais une létalité plus faible. Sur le plan épidémiologique, une
tour aéro-réfrigérante a été mise en cause dans un cas et des anomalies du
réseau d'eau chaude sanitaire ont été retrouvées dans 3 cas. Toutefois, le seul
point commun retrouvé est la présence d'un chauffe-eau solaire au domicile des
patients.
L'incidence faible de la
légionellose trouve des explications à travers des conditions climatiques
particulières (l'existence des alizés et du phénomène de brise), une plus
faible industrialisation avec un nombre de tours aéroréfrigerantes humides
moins important, une adduction en eau majoritairement souterraine et une
efficacité du système de surveillance favorisée par la petite surface de l'île.
Toutefois, le risque d'expansion des cas de légionellose n'est pas négligeable,
notamment par le développement rapide des chauffe-eaux solaires et peut-être de
la climatisation solaire dans le cadre du développement durable. En terme de
santé publique dans l'île, il serait nécessaire de prendre des mesures
préventives afin d'anticiper les crises sanitaires éventuelles. Du sur-risque
de sévérité observé par rapport à la métropole, il ressort la nécessité du
maintien d'une antibiothérapie probabiliste efficace contre les légionelles
devant toute pneumopathie grave pendant au moins 72 h en l'absence
d'amélioration, en attendant la confirmation diagnostique.