Etude descriptive des cas hospitaliers de
leptospirose à la Réunion (2004-2008)
Boidin E1, Renault P1*, D’Ortenzio E1,
Balleydier E1, Daniel B2, Lassalle C2, Filleul
L1
1 Cellule interrégionale d’épidémiologie, Institut de veille
sanitaire, Saint Denis, la Réunion, France
2 Direction régionale des affaires
sanitaires et sociales, Saint Denis, la Réunion, France
En France, la leptospirose
n’est pas inscrite sur la liste des maladies à déclaration obligatoire. La
surveillance est assurée par le Centre national de référence de la leptospirose
(CNR) qui s’appuie sur un réseau de laboratoires publics et privés en métropole
et outre-mer. A la Réunion, ce dispositif est complété par une surveillance
basée sur le signalement des cas hospitaliers à la Cellule de veille sanitaire
de la Drass (CVS), suivi d’une enquête à domicile. La dernière étude
épidémiologique réalisée sur les données réunionnaises, menée par
l’Observatoire régional de la santé de la Réunion, remonte à 2003.
Une surmortalité liée à la
leptospirose, constatée en 2006, avait conduit les pouvoirs publics à renforcer
les mesures de prévention. La présente étude a été conduite pour actualiser les
connaissances sur l’épidémiologie de la leptospirose à la Réunion, en
particulier en ce qui concerne la mortalité. Il s’agit d’une étude descriptive
des cas incidents hospitaliers entre 2004 et 2008 réalisée à partir des fiches
médicales de signalement et des données des enquêtes à domicile.
Sur la période d’étude, on
observe une relative stabilité du nombre annuel de cas signalés (40 à 50) qui
contraste avec la poursuite de la baisse tendancielle historique de l’incidence
de la leptospirose à la Réunion rapportée par le CNR. Selon toute
vraisemblance, ce phénomène traduit une meilleure exhaustivité des signalements
ces deux dernières années, liée à la mise en place de la CVS à la fin de
l’année 2006.
Cette étude confirme les
circonstances d’exposition habituellement associées à la maladie à la
Réunion : près de 80% des cas se
sont infectés entre janvier et juin, pendant la saison humide. Les communes le
plus touchées sont celles ayant une vocation agricole marquée. Les cas sont en
majorité des hommes d’âge actif. Le principal facteur d’exposition retrouvé est
l’exercice d’une profession agricole, déclarée ou non. Le sérovar le plus
fréquemment retrouvé reste « icterohaemorrhagiae » (60% des cas)
mais, en comparaison avec les précédentes études, on constate une diversification des sérovars isolés.
Enfin, la proportion de cas
signalés qui s’avèrent biologiquement non confirmés augmente en 2005, et surtout
2006, puis se normalise en 2007. Il en résulte une baisse des cas confirmés sur
la période 2005-2007 qui s’accompagne d’une forte augmentation de la létalité.
Cette situation pourrait être liée à l’épidémie de chikungunya dont le pic
épidémique se situait en février 2006. Les présentations cliniques des deux
pathologies étant proches, il est vraisemblable que des erreurs de diagnostic
initial se soient produites. Le taux de létalité particulièrement élevé en 2006
pourrait s’expliquer par un retard dans la mise en route du traitement
étiologique.
Au total, notre étude montre
que la surmortalité observée en 2006 résultait d’une augmentation de la
létalité et non de l’incidence. Ainsi, l’épidémiologie de la leptospirose à la
Réunion au cours de ces dernières années semble avoir été marquée par
l’épidémie de chikungunya.
*Auteur correspondant :
Philippe
Renault
Institut de veille sanitaire - Cire Réunion-Mayotte
2, bis avenue Georges Brassens