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Intoxication collective par «miel fou»

Intoxication collective par «miel fou»

Weber M 1,4, Chappel V 1, Abi-Naber F 2, Le Gallo A 3, Cadivel A 4, Ragonneau S 5, Verdière C 3, D’ortenzio E 4, Lassalle C 5, Metas E 6

1 Service d’urgences - SMUR, 97470 Saint-Benoît, 2 service d’urgences - SMUR, 97460 Saint-Paul, 3 SAMU – SMUR - service d’urgences, 97400 Saint-Denis, 4 Cire Réunion-Mayotte, 97408 Saint-Denis, 5 Drass Réunion, 97408 Saint-Denis, 6Association pour le développement de l’apiculture, 97410 Saint-Pierre

 

Contexte : Des intoxications par des miels sont décrites depuis l’ère pré-chrétienne. Le terme de « miel fou » a été consacré par l’usage. Il a été montré que ces miels contiennent des grayanotoxines, issues de certaines plantes de la famille des Ericaceae (rhododendrons et azalées en particulier), et non toxiques pour les abeilles qui vont butiner ces plantes. Ces toxines ont essentiellement un effet cardiotrope. Les cas contemporains surviennent pour la plupart en Turquie, sur la côte Est de la Mer Noire. Nous rapportons un cas d’intoxication collective survenu à l’île de la Réunion en janvier 2008.

Observation : Il s’agit d’une famille de six personnes à qui un petit producteur vient faire goûter sa récolte sous forme de miel en section. Les quantités ingérées sont faibles, allant de 15 à 30 grammes environ. Dix à quinze minutes après l’ingestion, les patients présentent de façon variable : sensation de malaise, nausées, vomissements, diarrhées, sensations vertigineuses, sueurs profuses, paresthésies, bradycardie, hypotension artérielle, troubles de conscience, mydriase. Un traitement symptomatique a été nécessaire chez trois patients et quatre patients ont été hospitalisés. L’évolution a été favorable en moins de 24 heures pour l’ensemble des patients.

Discussion : Agauria salicifolia ou bois de rempart ou bois de gale, espèce endémique de la zone sud-ouest de l’océan Indien, est connue pour contenir des grayanotoxines à l’origine de morts d’animaux se nourrissant de la plante. Une intoxication humaine a déjà été récemment rapportée à La Réunion après ingestion volontaire d’une décoction de feuilles de bois de rempart. L’enquête locale, dans l’environnement immédiat des ruches, montre la présence de bois de rempart en grande quantité, alors que l’espèce habituellement butinée en cette période (syzygium jambos ou jambrosade), présentait un retard de floraison du fait d’une sécheresse inhabituelle. La présence de grayanotoxine dans le miel ingéré reste à mettre en évidence, la technique n’étant disponible que dans de très rares laboratoires. Cette observation a été rapidement signalée à la Direction régionale des affaires sanitaires et sociale (Drass) ce qui a permis le retrait des échantillons suspects après alerte de la Direction des services vétérinaires et de la Cellule inter régionale d’épidémiologie Réunion-Mayotte (INVS). Il s’en est suivi une recherche de l’origine de l’intoxication avec le concours de l’association pour le développement de l’apiculture.

Conclusion : En période de floraison des plantes incriminées (décembre à février), des mesures visant à éviter de nouvelles intoxications doivent être mises en place.