Neurobilharziose invasive à S.
mansoni : deux cas concomitants dans une fratrie lors d’un bain à
Madagascar.
1M.
Rocaboy, H. Flodrops, L. Houdon, P. Aubry, F. Renou, D. Malvy
1 Service de pédiatrie, Groupe hospitalier Sud Réunion, 97410 St Pierre
La bilharziose à Schistosoma. mansoni est un problème
majeur de santé publique à Madagascar et en expansion dans de nombreux pays en
développement. L’accroissement du nombre de voyageurs vers les pays tropicaux,
(50 millions par an), entraîne une augmentation du nombre de primo-infection
chez le migrant, se traduisant par une augmentation des bilharzioses invasives
au retour de zone d’endémie. Des manifestations rares de cette maladie, telles
des atteintes neurologiques ont alors été mises en évidence. La
neurobilharziose invasive est une affection sévère dont la physiopathologie
suggère une réaction d’hypersensibilité où le rôle des éosinophiles, de
l’immunité cellulaire, des complexes immuns circulants et des anticorps anti
phospholipides a été évoqué. Elle est probablement due à une infestation
massive de sujets n’ayant jamais été en contact avec le parasite, et peut être
aggravée ou déclenchée par une lyse parasitaire consécutive au traitement.
Nous présentons les cas de deux enfants contaminés lors du
même bain en eaux douces à Madagascar. Il s’agit des quatrième et cinquième cas
rapportés de neurobilharziose invasive due à S. mansoni. Les trois précédents cas rapportés proviennent du Mali,
de la République Centre africaine (RCA) et de Madagascar. Le cas de la RCA a
gardé des séquelles neurologiques. Ces enfants n’avaient jamais été infectés
auparavant. Leur infection massive par la pénétration transcutanée de
furcocercaires lors du bain est certaine. Le bain prolongé dans un bassin où
les hôtes intermédiaires pullulent, interrompu par un prurit intense sur tout
le corps, puis la précocité des manifestations cliniques (trois semaines après
la contamination) et enfin leur sévérité accréditent cette hypothèse.
L’étude de ces deux cas a permis de retrouver l’aspect
radiologique des lésions cérébrales décrites dans la littérature : foyers
multiples bilatéraux et asymétriques en IRM, à type de micro-infarctus cérébraux, fréquemment
en regard des centres ovales mais également plus largement disséminés, des
zones jonctionnelles jusqu’en région sous-corticale et corticale. Chez un
enfant, une lésion
médullaire a également été mise en évidence, non décrite dans la littérature.
Selon la littérature, l’intérêt de réitérer à distance de la
phase aiguë le traitement anti-parasitaire est justifié malgré la guérison de
la bilharziose invasive. En effet le risque de voir se développer une
bilharziose en phase d’état, souvent asymptomatique, est réel car le
praziquantel est peu actif sur le schistosomule, stade parasitaire quasi
exclusif de la phase invasive.
Cette étude a également confirmé, au
moins sur le versant biologique, l’exacerbation d’une réaction
immuno-allergique post-thérapeutique. Cette exacerbation justifie l’intérêt des
corticoïdes en association au praziquantel.
Cependant, dans les deux cas
étudiés, la forte probabilité d’une amibiase tissulaire en cours a contre
indiqué le traitement immunosuppresseur. L’évolution clinique après
praziquantel a néanmoins été rapidement favorable, montrant les limites de la
corticothérapie recommandés par certains auteurs. Le nombre croissant de cas au
retour de zone d’endémie, la sévérité de cette maladie et le risque de
séquelles neurologiques indiquent qu’une connaissance plus précise de cette
maladie et de ses schémas thérapeutiques est nécessaire pour en améliorer la
prise en charge.