D’Ortenzio E1*, Sissoko D1, Renault P1,
Lassale C2, Filleul L1
1 Cellule interrégionale d’épidémiologie, Institut de
veille sanitaire, Saint Denis, La Réunion, France
2 Direction régionale des affaires sanitaires et
sociales, Saint Denis, La Réunion, France
Depuis 1979, la Réunion est
considérée par l’OMS comme un territoire de non endémicité palustre. Depuis,
sont rapportés des cas de paludisme d’importation et quelques cas de paludisme
autochtone ont été décrits. En parallèle, le flux de voyageurs à destination de
pays impaludés, essentiellement dans la zone Océan Indien (Comores, Mayotte,
Afrique du Sud et Madagascar), augmente régulièrement. L’objectif de ce travail
est d’identifier des groupes à risque de paludisme d’importation chez le
voyageur par l’analyse des données épidémiologiques issues des déclarations
obligatoires 2003-2008 et des données de flux de voyageurs aériens en partance
pour des pays impaludés (Source : Chambre de Commerce et d’Industrie de
la Réunion). L’incidence annuelle par pays a été calculée à partir du
nombre de voyageurs au départ de l’aéroport de Saint-Denis et de Saint-Pierre.
Entre 2003 et 2008, 684 cas de
paludisme d’importation ont été notifiés à la Réunion (163 en 2003, 67 en
2008). L’âge médian des patients était
de 35 ans et le sexe-ratio H/F de 2,1. Les enfants < 15 ans représentaient
20,8% des cas. Près de la moitié des patients (47,5%) étaient nés dans une zone
d’endémie palustre (Madagascar, Comores ou Mayotte). Plasmodium falciparum
était responsable de 84,5% des accès. Aucune chimioprophylaxie n’a été
suivie dans 50,1% des cas. Près de 60% des patients ont été hospitalisés. Le
pays de contamination était essentiellement l’Union des Comores dans 50,9% des
cas, Madagascar dans 38,2%, Mayotte dans 3,1% et l’Afrique du Sud dans 2,3% des
cas.
Dans la population de voyageurs impaludés au retour
des Comores, l’âge médian était de 34 ans, le sexe-ratio de 1,5 et 44,8%
étaient nés aux Comores (vs 23,5% sur le total des cas). Parmi ces cas, la
moitié avaient pris une chimioprophylaxie inadaptée à la zone (groupe 3) (32,7%
ont pris de la chloroquine seule, 6,9% du proguanil seul et 11,2%
chloroquine+proguanil), l’autre moitié rapportant une absence totale de
chimioprophylaxie.
En 2008, l’incidence cumulée du
paludisme d’importation était de 55 / 100 000 voyageurs. Il était de 1481
/ 100 000 voyageurs en partance pour les Comores, et de respectivement 37, 19 et
3 / 100 000 pour ceux en partance pour Madagascar, l’Afrique du Sud et Mayotte.
Le nombre de cas annuel et
l’incidence du paludisme d’importation à la Réunion, toute destination
confondue, est en diminution depuis 2003. En revanche, un voyage dans l’Union
des Comores apparaît dans cette étude à fort risque d’acquisition du parasite,
avec une incidence constamment très élevée entre 2003 et 2008
(1481/100 000 en 2008). Une des raisons essentielles est une
chimioprophylaxie absente ou inadaptée constamment rapportée par les voyageurs
impaludés au retour des Comores. Ces voyageurs, souvent des personnes en voyage
dans leur pays d’origine, devraient bénéficier d’une attention particulière et
faire l’objet de conseils de prévention adaptés à leur situation socio-économique.
Un programme de communication et de mobilisation sociale ciblé sur les risques
liés au voyage serait utile auprès de ces populations à risque.
*Auteur correspondant :
Eric D’Ortenzio
Institut de veille
sanitaire - Cire Réunion-Mayotte
2, bis avenue Georges Brassens
97408 Saint-Denis