Dermatoses bulleuses graves chez l’enfant lors d’une
épidémie de chikungunya a la Réunion : a propos de 13 cas.
S.
Robin¹, D. Ramful², J. Zettor¹, S. Robert², J. Marichy³, L. Benhamou³, M-C.
Jaffar*, H. Walters¹, P. Nyombe¹.
¹ Service de Pédiatrie, ² Service de
Réanimation Pédiatrique, ³ Service des Grands Brûlés, *Service de Biologie, CHD
Bellepierre, Saint Denis de la Réunion.
Le virus Chikungunya (CHIK) est un
arbovirus dont le vecteur est le moustique, l’Aedes albopictus à la Réunion. Il est responsable d’une maladie
habituellement spontanément résolutive marquée par une fièvre, des arthralgies
et une éruption maculo-papuleuse. Depuis mars 2005, la Réunion est touchée par
une importante épidémie de CHIK. Fin 2005 nous avons vu augmenter l’incidence
des éruptions bulleuses graves chez l’enfant alors que l’épidémie s’amplifiait.
L’implication du virus CHIK dans la survenue de dermatoses bulleuses graves est
décrite pour la première fois.
Objectifs : Description de l’éruption bulleuse
grave lors de l’infection à Chikungunya.
Méthodes : Etude sur tous les enfants âgés de
1 mois à 18 ans hospitalisés au CHD, présentant une éruption bulleuse étendue
sur plus de 10% de la surface corporelle depuis mars 2005. Etude rétrospective
jusqu’à mi-février puis prospective.
Résultats : Treize enfants ont présenté une
éruption bulleuse en 3 mois ; 5 filles, 8 garçons. L’âge moyen est de 3,23
mois (1-5,5 mois). L’apparition de bulles est précédée de fièvre (délai moyen
2,5 jours) puis d’un érythème. La prise d’ibuprofène est retrouvée dans 6 cas.
L’éruption est d’évolution ascendante intéressant les membres inférieurs puis
les membres supérieurs et le tronc ; elle est prurigineuse. L’atteinte
endobuccale (lésions aphtoïdes et gingivite) est notée dans 4 cas. Une atteinte
myocardique associée (élévation des enzymes cardiaques, hypertrophie) dans les
4 cas. Dans 8 cas, un syndrome algique a nécessité des antalgiques de palier 2
ou 3. Des immunoglobulines intraveineuses ont été administrées dans 10 cas
devant l’évolution extensive du décollement. La prise en charge est réalisée
avec des soins de grands brûlés dans tous les cas. Une desquamation des
extrémités observée 15 jours après les premiers signes de la maladie.
L’évolution est favorable dans tous les cas. La RT-PCR (CHIK) est positive dans
le liquide de bulle chez 5 enfants dont 3 avaient également une RT-PCR positive
dans le sang. La RT-PCR dans le sang est positive pour 6 enfants. La sérologie
sanguine CHIK positive en Ig M chez tous les enfants déjà revus à 1 mois. L’immunofluorescence
sur les biopsies de bulle en faveur d’un processus immuno-allergique.
Anatomo-pathologie en cours.
Discussion : L’éruption bulleuse semble toucher
préférentiellement les garçons de moins de 6 mois. Contrairement à
l’épidermolyse bulleuse toxique, les lésions intéressent préférentiellement les
parties distales des membres et l’évolution est favorable dans tous les cas.
Conclusion : Le
virus Chikungunya est une cause de dermatoses bulleuses graves chez les
nourrissons de moins de 6 mois, non décrite dans la littérature. Une étude
prospective est en cours afin de compléter l’étude sémiologique et de définir
les facteurs favorisants.