Evaluation
des handicaps visuels dans la population mahoraise de cinq ans d'age en l'an
2000Etude prospective sur 2 849 enfants
Jean Joseph Roche.
CHD Félix Guyon Saint Denis de la Réunion
Nous ne disposons d'aucune étude
pour estimer la prévalence du handicap visuel à Mayotte. Il paraît important
non seulement d'estimer le handicap visuel d'une tranche d'âge uniforme la plus
complète possible ici population mélanoderme de 5 ans d’âge, mais aussi de le
comparer aux études épidémiologiques faites en France métropolitaine et à l'étranger.
Cette étude a été conduite chez des enfants nés en 1995 au sein de leur
deuxième année de maternelle soit 2 849
enfants ayant 5 ans en 2000 représentant 87,66% des enfants scolarisés et
56,98% des enfants de la classe d’âge
Les objectifs de l’examen par deux enquêteurs
un ophtalmologiste et
un orthoptiste sont de :
- repérer les anomalies objectives en
inspectant le visage de l’enfant à la recherche de signes d’inclinaison de la
tête , de nystagmus, de malformation, d’aspect des fentes palpébrales,
d’albinisme, de strabisme, d’aspect des yeux (microphtalmie, pupilles, cornée),
etc…
- mesurer le pouvoir discriminatif de
la vision sur des optotypes présentés à 5 mètres et de près en chiffrant
l’acuité visuelle , les optotypes ont été enseignés par l’instituteur.
- rechercher un trouble de la vision des couleurs par les tests des chemins d’Ishihara ;
- pratiquer l’examen sous
écran unilatéral
puis alterné, recherche de la motilité oculaire dans 6 positions du regard et
mesure du punctum proximum de convergence (PPC)
Le but est
d’amener les enfants dépister à la consultation hospitalière pour confirmer les
anomalies et d'apprécier la prévalence des déficients visuels pour parvenir à
posséder à Mayotte une estimation des besoins en matière de pathologies
ophtalmologiques à traiter, de lunettes à prescrire, de rééducation et de
prévoir le développement de programme de prise en charge des déficiences
visuelles.
Le nombre total
de pathologie prise en charge en consultation spécialisé représente 4,42%
de l’ensemble des enfant et se décompose en :
•2,98% de troubles de la
réfractions : 63 astigmatismes, 22 myopes dont 5 supérieurs à 5 dioptries
et 8 hypermétropes dont un aphaque de 13 dioptries
•0,42% de pathologies oculaires
•0,70% de troubles oculomoteurs sont représentés par 2 insuffisances de
convergence, 4 exphories supérieures à 6 d, 10 strabismes dont 6
divergents et 4 convergents , enfin par 3 nystagmus ;
•0,42% d’autres pathologies sont 3
ptosis ;2 microphtalmies ;4 cataractes : 3 congénitales 2 conjonctivites
allergiques ; 1 syndrome malformatif de l’angle iridocornéen ;
De
la discussion, il ressort que :
- aucun enfant de notre classe
d’âge n’est non voyant. Cependant
hors étude, à Mayotte 3 enfants de 5 ans sont suivis dans le service d’ophtalmologie
pour cécité bilatérale totale (une microphtalmie bilatérale, un IMC grave et un
glaucome congénital).Ce qui donne un taux de malvoyance de 1/1000
- qu’aucun trouble de la vision des couleurs n’a été noté. Le test d’Ishihara n’a pas relevé de sujet ayant un déficit dans le
rouge ou le vert, contrairement au taux de 8% de Daltonisme en métropole. Cela
est conforme aux donnés de Cruz Coke de taux inférieur à 2% de Daltonisme en
zone équatoriale
Les troubles moteurs sont révélés par :
• 10 strabismes manifestes soit 3,3 % de la pathologie. Sachant que
certains strabismes se révèlent plus tard nous nous rapprochons des 4%
métropolitains.
•des exophories qui peuvent passer en tropie et donner des strabismes
manifestes vers 6 à 8 ans.
•Les exophories et exotropies
sont plus nombreuses que les esophories et esotropies contrairement de ce qui
est rencontré en France métropolitaine. Nous n’avons pas
pratiqué de test au verre +1.5 en dépistage car à l’âge de 5 ans la question de
comparaison est mal saisi.
• Nous savons par ailleurs que 65% des enfants strabiques perdent la vision d’un œil s’il ne sont pas
traités.
Les
pathologies manquantes dans l’étude mais présente à Mayotte sont les
suivantes :
- Pas de glaucome congénital ou infantile alors que trois glaucomes de
l’enfants sont suivis dans l’île,
- Pas de lésion rétinienne ni papillaire et en particulier pas de lésion
de toxoplasmose, il est à noter que seul les 208 enfants vu par
l’ophtalmologiste ont eu un fond d’œil.
- Pas d’autres syndromes mal formatifs chez ces enfants scolarisés.
- Pas de séquelle d’infection générale ou oculaire, un seul traumatisme
avec cataracte.
- Peu de pathologie générale
- Aucun Trisomique 21 ne s’est rendu chez l’ophtalmologiste
alors que 5 ont été vus à l’école,
- un seul enfant
infirme moteur cérébral a consulté,
- aucun autiste ni
retard mental
- un seul albinos
alors qu’il y en a plusieurs par tranche d’âge.
Nous en déduisons des
considérations génétiques :
- sur les troubles de la réfraction, l’étude montre que 3,2 % des enfants ont
besoin de lunettes à 5 ans à Mayotte contre 13% en France métropolitaine à 12
ans. Cette
différence représente probablement un caractère héréditaire qui a déjà été
prouvé pour les fortes myopies, les forts astigmates et hypermétropes associés
souvent à des syndromes mal formatifs
- sur les troubles de la vision
des couleurs : les mères seraient peu
porteuses de ce gène.
- sur les troubles
strabiques : le petit nombre d’hypermétropies modérées (inférieure à 4
dioptries) rencontrées ainsi que les ésotropies, le nystagmus latent et les
déviations verticales dissociées démontrent la rareté du syndrome de strabisme
précoce dont l’étiologie est liée principalement à des facteurs héréditaires
(autosomique dominante ou récessive).
Cette
étude sur 2849 enfants Mahorais nous a permis de montrer que :
- le nombre d’handicapés visuels
sévères est comparable à celui des études épidémiologiques métropolitaine et
anglo-saxonne, inférieur à celui de l’afrique.
- les troubles visuels
réfractifs à 5 ans sont 3 fois moins nombreux (4.42%) qu’en métropole
(13.7%)pour des tranches d’âge plus grandes.
- l’hypermétropie est moins
fréquente
Elle permet de projeter les moyens
structuraux et humains à mettre en œuvre pour lutter contre les handicaps
visuels à Mayotte en augmentant de 1 à 5 le nombre de médecins ophtalmologistes
pour 200 000 habitants.
Cette étude
semble la première du genre à Mayotte et en France métropolitaine par son
homogénéité d'âge et de population, par son recrutement en classe de moyenne
maternelle et par le lieu : l'insularité de Mayotte. Elle met en évidence les
anomalies les plus communes de la pathologie ophtalmologique. Elle montre que
le nombre d'handicapés visuels sévères est comparable à celui des études
épidémiologiques métropolitaine et anglo-saxonne mais inférieur à celui de
l’Afrique continentale. Les troubles visuels réfractifs à 5 ans sont 3 fois
moins nombreux qu'en métropole pour des tranches d'âge plus grandes. Elle
permet de projeter les moyens à mettre en ouvre pour lutter contre les
handicaps visuels à Mayotte .
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