Enquête de séroprévalence du chikungunya
et de la dengue à Mayotte en 2006 : résultats préliminaires.
D Sissoko1,
A Moendandze2, C Giry3, F Pettinelli3, JL
Solet1, V Pierre1 et l’équipe SERO-CHIMAY. 1InVS,
Cire Réunion Mayotte, Saint-Denis de la Réunion, 2Equipe
SERO-CHIKMAY (Dass/CH Mayotte), Mamoudzou, 3Laboratoire de biologie
du CH Mayotte, Mamoudzou
Introduction
L’introduction récente en 2005 du virus du chikungunya à
Mayotte, s’est traduite par une circulation sous forme épidémique de grande
intensité en 2006, en raison d’une réceptivité importante de la population liée
à l’absence d’immunité préalable. Dans ce contexte, il est apparu pertinent de
déterminer l’ampleur de l’infection
chikungunya à Mayotte, notamment
d’estimer la taille de la population non immune.
Objectifs
Les objectifs principaux
sont : i) Mesurer la prévalence des marqueurs sérologiques du chikungunya
au sein de la population générale à l’issue
des deux vagues épidémiques
2005-2006 ; ii) Evaluer la proportion de formes asymptomatiques de
chikungunya. L’objectif secondaire est d’estimer le niveau de circulation des
virus de la dengue à Mayotte.
Méthodes
Une enquête transversale a été conduite entre novembre et
décembre 2006 sur 1154 personnes âgées de plus de 2 ans vivant dans 420
logements sélectionnés sur l’ensemble du territoire. La méthode d’échantillonnage
était un sondage en grappe à 2 degrés (EPI OMS modifié) à partir de la base
Insee de recensement de la population de 2002.
Après accord des personnes sélectionnées, les infirmiers ont
réalisé le prélèvement veineux ensuite,
des enquêteurs locaux expérimentés ont recueilli les variables à partir d’un
questionnaire standardisé. Pour les personnes âgées de moins de15 ans, c’est la
personne s’occupant d’elle qui a été interrogée.
Les analyses sérologiques ont été effectuées par le
laboratoire du CHM.
Les définitions suivantes ont été adoptées :
(1) Une infection confirmée était définie par la présence
dans le sérum du sujet, des IgM et ou des IgG (chikungunya) ou uniquement des
IgG (dengue) ;
(2) Une personne était considérée comme ayant eu un
chikungunya symptomatique si elle déclarait avoir présenté un épisode clinique
de la maladie entre mars 2005 et la
date de l’enquête.
Résultats
Nous présentons ici les résultats préliminaires de l’analyse
descriptive de l’enquête.
Parmi 1154 participants,
499 étaient de sexe masculin et 655 étaient de sexe féminin. La répartition par
classes d’âge était : 2-14 ans (302 sujets, 26,3%) ; 15-29 ans (390
sujets, 33,7%) ; 30-49 ans (330 sujets, 28,5%) ; 50 ans et plus (132
sujets, 11,5%).
Chikungunya : La
prévalence des anticorps anti-chikungunya (IgG et / ou IgM) était de 38,1%
(IC95% : 35,5-41,0). La prévalence spécifique par âge des anticorps était
plus élevée dans le groupe d’âge de 15 à 49 ans comparée aux groupes plus
jeunes et plus âgés : 2-14 ans = 35,8% (IC95%= 30,5-41,6) ;
15-29 ans = 40,5% (IC95%= 35,6-45,8) ; 30-49 ans = 40,3% (IC95%=
34,9-45,6) ; 50 ans et plus= 30,3% (IC95%= 22,6- 45,8).
La confrontation du résultat sérologique avec la déclaration
de la personne enquêtée quant à l’existence d’un épisode de chikungunya
pendant la période concernée montrait : (i) Parmi les personnes ayant une
sérologie positive, 25,4% n’ont pas déclaré d’épisode clinique; (ii) Chez les
personnes ayant une sérologie négative, 15% ont déclaré avoir eu un épisode clinique.
Dengue : La
prévalence des IgG anti dengue était de 23,1% (IC95%= 20,6-25,6). Cette
prévalence était plus importante chez les personnes âgées de plus de 15 ans:
2-14 ans = 2,6% (IC95%= 1,3-5,1) ; 15-29 ans = 25,1% (IC95%=
20,9-29,7) ; 30-49 ans = 35,4% (IC95%= 30,3-40,9) ; 50 ans et plus=
32,6% (IC95%= 24,7- 41,3).
Conclusion
L’épidémie de chikungunya qui a sévi dans la région en 2005
et 2006 a touché 38% de la population à Mayotte. Cette prévalence est
comparable à celle retrouvée à la Réunion par une enquêtée similaire conduite
par l’Inserm.
La proportion de 25% de formes asymptomatiques (personnes
ayant des traces sérologiques de chikungunya
alors qu’elles ne rapportent pas d’épisode clinique chikungunya)
retrouvée dans cette étude est supérieure à celle de 15% trouvée à la Réunion.
Ceci pourrait s’expliquer par une perception différente de la maladie entre les
populations des deux îles.
Les résultats de cette enquête montrent également que la
dengue a circulé au sein de la population de Mayotte notamment chez les
personnes âgées de plus de 15 ans. Ceci est compatible avec les épidémies de dengue rapportées
auparavant dans l’archipel des Comores
et dont la dernière remonte, selon la littérature, à 1993.
Les statistiques analytiques de
l’étude sont en cours.