.
 

Faussement exotique : le syndrome de tako-tsubo

Faussement exotique : le syndrome de tako-tsubo

1 BOURGAIN N., 1 MARTINET. O., SCHLOSSMACHER P.1, DROUET D.1, 1LEFORT Y, MOSHINALY F 2, GAÜZERE B-A 1

1Service de réanimation polyvalente, 2service de cardiologie. Centre hospitalier départemental Félix Guyon. 97405 Saint-Denis Réunion.

 

Observation : Nous rapportons le cas d’un patiente âgée de 72 ans, admise en service de réanimation au décours d’une péritonite consécutive à une cœlioscopie pour syndrome sub-occlusif. L’exploration de l’état de choc a mis en évidence une altération sévère de la fonction ventriculaire gauche (fraction d’éjection ventriculaire égale à 20%), concomitante d’une élévation franche de la troponine (5,17 ng/ml, valeurs normales 0,00 - 0,15), associée à des troubles de repolarisation. Hormis un syndrome dépressif et un éthylisme lié à son veuvage estimé à 15-20  gr d’alcool par jou), la patiente ne présentait ni antécédents cardiaques, ni facteurs de risques spécifiques. La coronarographie a montré une altération très importante de la fraction d’éjection globale du ventricule gauche (20 %). La ventriculographie gauche montrait une importante hypokinésie apicale et antéro-latérale, la coronarographie était normale. L'absence de lésion coronarienne significative et l’aspect caractéristique de la ventriculographie ont fait évoquer un syndrome de tako-tsubo. Sous support de drogues inotropes (dobutamine), l'évolution a été rapidement favorable en une semaine, avec normalisation rapide de la fonction ventriculaire, sevrage du respirateur et sortie du service.

Discussion : Le nom japonais tako-tsubo vient du piège à goulot étroit et à fond large et rond destiné à attraper des poulpes. Le syndrome de tako-tsubo, ou syndrome de ballonisation apicale transitoire du ventricule gauche, résulte d’une sidération myocardique survenant après un stress émotionnel. Initialement décrit par des auteurs japonais au décours des tremblements de terre, il est de plus en plus souvent rencontré dans la population caucasienne. Il se caractérise par une dysfonction antéroapicale transitoire du ventricule gauche, associée à l'absence de lésion significative des artères coronaires, à une augmentation modérée des enzymes cardiaques. Il concerne le plus souvent des femmes post-ménopausées. Le tableau clinique est celui d'un syndrome coronarien aigu avec des douleurs thoraciques qui s'accompagnent d'anomalies électrocardiographiques de l'onde T et du segment. Un événement déclenchant est retrouvé dans près de la moitié des cas. L'évolution est résolutive sans aucun décès. Les complications sont présentes dans 11 % des cas sous forme de défaillance cardiaque ou choc cardiogénique. Il concernerait 0,7 % des syndromes coronariens aigus hospitalisés, soit en extrapolant à la France entière, près de 1400 patients chaque année. L'étiopathogénie reste discutée : rôle délétère et toxique d’un excès de catécholamines, effet sur le débit des artères coronaires épicardiques, spasme microvasculaire diffus, toxicité directe sur les myocytes objectivée par les biopsies. Le diagnostic différentiel se pose avec le syndrome coronarien classique dont l’infarctus et avec la myocardiopathie due à un spasme coronaire.

Conclusion : Identifier un tako-tsubo permet d'éviter certains médicaments potentiellement dangereux comme les inotropes ou les thrombolytiques. Il n’existe pas de critères cliniques ou biologiques autorisant un diagnostic précoce et permettant une optimisation des prises en charge thérapeutiques.