Non-observance des vaccinations de l'enfant voyageur sous les tropiques
AUBRY P. Professeur visiteur de l’Université Victor Segalen Bordeaux 2,
Professeur émérite à la Faculté de Médecine d’Antananarivo (Madagascar), 11
avenue Pierre Loti, Saint Jean de Luz, F-64 500. Aubry.Pierre@wanadoo.fr
En 2006, plus de 11
millions de Français ont voyagé à l'étranger, dans plus de 120 pays, ce qui
correspond à plus de 22 millions de séjours, dont 7 millions dans les pays en
développement, considérés comme pays à risque infectieux. On estime que 13% des
longs séjours (quatre nuits consécutives hors du domicile) ont été effectués en
2004 par des enfants de moins de 15 ans, soit 2,1 millions de séjours, la
plupart par des enfants de familles immigrées.
En matière de
vaccinations, le voyage est l'occasion de s'assurer que le Calendrier Vaccinal
est à jour: BCG, DTCoqPolio, Haemophilus
influenzae type b, pneumocoque, hépatite B, ROR,
mais seuls cinq de ces vaccinatioins sont obligatoires : BCG, DTCoqPolio.
En fonction de la
situation épidémiologique des zones tropicales visitées, l'enfant voyageur doit
avoir :
- une vaccination
obligaoire : la fièvre jaune (Afrique subsaharienne, Amérique latine),
- des vaccinations
indispensables dans certaines conditions : hépatite A (Afrique du nord, Afrique
noire), méningocoque ACYW135
(Ceinture africaine de la méningite élargie), typhoïde (selon l'endroit et la
durée du séjour), rage (séjour prolongé en zone isolée à risque), encéphalite
japonaise (Asie du sud et du sud-est, séjour prolongé).
Il existe peu de
données publiées concernant la couverture vaccinale de l'enfant voyageur se
rendanr sous les tropiques. Une étude menée en 2005 en France métropolitaine
chez 196 enfants voyageurs de moins de 6 ans (versus 178
enfants non-voyageurs) permet de mieux connaître l'observance des vaccinations
de l'enfant voyageur. L'observance est mauvaise : le taux d'observance de la
fièvre typhoïde et de l'hépatite A a été inférieur à 20% alors que 72% des
enfants ont voyagé dans des zones à risque; la vaccination contre la rage n'a
été proposée qu'une seule fois alors que des régions à risque ont été visités
par 64% des enfants; la vaccination
méningococique n'a été proposée qu'à 3% des enfants; la vaccination contre
l'encéphalite japonaise n'a jamais été proposée, alors que 15% des enfants ont
voyagé dans des zones à risque. En définitive, les enfants voyageurs n'ont pas
reçu significativement plus de vaccins du Calendrier Vaccinal que les
non-voyageurs. Il y a donc une non-observance des vaccinations chez l'enfant
voyageur. Les raisons en sont nombreuses :
- réticence des
familles à des vaccins du Calendrier Vaccinal non obligatoires : exemple de
l'hépatite B dont le taux de couverture était de 26% en 2003 ;
- réticence des
familles à des vaccins du voyageur : exemple de la fièvre jaune et de ses
effets indésirables graves tout-à-fait exceptionnels chez l'enfant s'il est
vacciné après l'âge de 12 mois ;
- méconnaissance du
risque infectieux par les familles, mais aussi par les médecins (exemple de la
rage)
- limites
financières, réelles pour les familles immigrées.
Il est donc
nécessaire d'améliorer l'information auprés des médecins, des infirmières, des
familles et d'améliorer l'accessibilité à des vaccins trop souvent négligés.